Aux petits soins dans le monde

Aux petits soins dans le monde

22.09.2015

Infirmier avant tout, Déodat Nemeth raconte les missions qui l’ont menées à travers le monde, fait côtoyer le dénuement et découvrir les pratiques de soins dans les zones les plus isolées. Il raconte son expérience dans un livre témoignage écrit avec Julien Moreau (ed La boîte à Pandore, 2015). Interview de l’infirmier baroudeur.

 

Diplôme d’infirmier en poche, vous avez travaillé en clinique, puis choisi de voyager. Quel désir nourrissiez-vous de parcourir le monde ?

Aucun ! Mon graal de jeune diplômé, c’était le SAMU. C’est arrivé sans le chercher. Alors que j’étais intérimaire dans une clinique et célibataire sans enfant, j’ai postulé au Club Med. J’ai été embauché en tant qu’infirmier, d’abord en Turquie, puis aux Bahamas. J’ai ensuite assuré deux ou trois missions humanitaires avant de travailler pour une ONG qui assurait des missions de santé pour des compagnies de pétrole, gaz et mines. Le virus du voyage s’est emparé de moi petit à petit.

Vous avez travaillé dans des pays à risques tels que le Yémen, la République Démocratique du Congo, le Soudan ou la Mauritanie. Avez-vous parfois eu peur ?

Non, je n’ai jamais éprouvé ce sentiment. Je me déplaçais d’un pays à l’autre, là où on me demandait de partir, sans me poser de questions. Je faisais mon métier. Pourtant je suis allé dans des zones où les risques étaient réels, que ce soit sur le plan politique, social ou sanitaire. J’ai eu peur de manière rétro-active, une fois que je suis rentré en France et que j’ai écrit le livre avec Julien Moreau, un journaliste devenu un ami. Ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai réalisé ce que j’avais vécu.

Lors de vos pérégrinations à travers le monde, qu’avez-vous découvert en matière de soins et de systèmes médicaux ?

En plus des soins auprès du personnel expatrié, j’ai été amené à m’occuper de la population locale. Là, j’ai pris conscience que l’on ne peut pas soigner les gens malgré eux, on doit tenir compte de leur culture. Il y a des croyances très ancrées et il est difficile de passer outre quelquefois. Souvent, j’ai essayé de discuter, par exemple au Togo où la médecine vaudou préconise la poudre de carapace de tortue pour soigner l’asthme, j’ai tenté de montrer que ces remèdes et croyances ne suffisent pas. Mais j’ai surtout vu à quel point ces populations ne bénéficient pas de vrais soins et fonctionnent en mode « survie ». Vus avec nos yeux, leurs moyens semblent archaïques.

Maintenant que vous avez posé vos valises et fondé une famille, quelles leçons gardez-vous de vos voyages ?

Je pense que beaucoup d’entre nous devraient aller voir ce qui se passe dans ces pays ; ils réaliseraient que nous ne sommes pas si mal lotis. Et pourtant il y règne une solidarité familiale qui n’existe plus chez nous. Là-bas, quand une personne âgée n’est plus autonome, on la garde avec soi. Cela invite à réfléchir. Je ne comprends pas pourquoi, à l’heure de la mondialisation, nous ne partageons par les bonnes pratiques culturelles qui existent sur la planète.