Les « quincados », ces quinquagénaires qui goûtent la vie comme des ados

Les « quincados », ces quinquagénaires qui goûtent la vie comme des ados

09.09.2019

Ils ont la cinquantaine heureuse : jeunes dans leur tête, dynamiques au possible, les quinquagénaires ont de plus en plus une énergie et un état d’esprit dignes des trentenaires.
Ces « quincados » croquent la vie à pleines dents.

La chanteuse Zazie, 54 ans, le clame dans son single Speed : « T’es pas tout neuf, mais pas si vieux. Non, t’es flambant vieux ! » Comme elle, une foule de quinquagénaires revendiquent leur âge sans pour autant se morfondre à l’idée de vieillir. En pleine forme, ils sont aussi à l’aise avec la technologie que les jeunes et nourrissent une insatiable envie de se faire plaisir et de s’émanciper des contraintes. Le sociologue Serge Guérin a créé un mot-valise en 2013 pour désigner ces adultes : les « quincados ». Ils diffèrent totalement des « adulescents » qui sont « des adultes de tous âges qui s’infantilisent et vivent un prolongement interminable de l’adolescence », comme les a définis en 2002 le psychanalyste Tony Anatrella. Les quincados sont des adultes entre 45 et 60 ans qui assument totalement leur âge, mais qui refusent de se comporter comme des vieux.

Qui est exactement le quincado ?

Le quincado est un adulte de 45 à 60 ans qui s’est généralement déjà pris une claque à titre personnel, familial ou professionnel. Il est actif, en bonne santé et a pris conscience d’une chose : avec l’accroissement de l’espérance de vie, il sera encore là dans 30 ans. Il décide donc de réinventer sa vie. Au milieu de son existence, il vit une seconde adolescence avec la maturité en plus. Il ne joue pas au jeune et ne se complaît pas dans une adolescence superficielle. Il ne regarde pas vers le passé en refusant de grandir.
 

Pourtant dans le monde professionnel, le quincado n’est-il pas déjà considéré comme un senior ?

Le quincado est vu comme un problème par l’entreprise alors même qu’il est une ressource extraordinaire ! Le quincado n’est pas blasé, il a encore et toujours envie. Parfois il souhaite continuer dans la voie qu’il a tracée au départ, parfois il a envie de changer. Il a gardé son âme d’enfant en ce qu’il a encore soif de surprises, de découvertes, d’innovations. Le problème relève du regard : dans l’entreprise, quelqu’un qui a plus de 45 ans est déjà considéré comme un senior et il est plus ou moins mis de côté. Il faut rajeunir le regard sur le quincado, être positif et bienveillant, l’accompagner dans son évolution.
 

Avoir la cinquantaine en 2019 n’est donc plus synonyme d’être vieux, tant physiquement que psychologiquement ?

Le quincado ne veut pas se comporter comme un préretraité et refuse d’enfiler le costume du vieux. Quelqu’un qui a 50 ans en 2019 ressemble plus à quelqu’un qui avait 35 ans en 1959. Nous avons tous rajeuni d’une quinzaine d’années, à la fois physiquement et moralement ! Le quincado a le sens du tragique. Il sait qu’à la fin, il meurt, mais en attendant il se dit : ‘’Je ne vais pas m’ennuyer. Je préfère le risque des ennuis plutôt que l’ennui.’’ Il y a donc l’adolescence, puis la maturescence : celle-ci est presque infinie, même si on sait qu’à un moment, il y a la sénescence. La vie humaine moderne est conçue comme ça… et c’est une bonne nouvelle.
 

Serge Guérin est sociologue, chercheur et membre du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge.
Il est l’auteur de : Les quincados  (Calmann-Levy, 2019).

Les « quincados », ces quinquagénaires qui goûtent la vie comme des ados